Vendredi 5 Avril, Survie Gironde vous propose de venir assister à la présentation du livre "Silence Turquoise" par Laure de Vulpian, journaliste à France Culture.
Depuis l'arrivée du juge Trévidic au pôle anti-terroriste, l'enquête sur l'attentat du 6 Avril 1994, que l'on considère comme le point de départ du génocide des Tutsi et Hutu modérés est en train de prendre un tournant, à contre-courant du discours officiel tenu par la France.
Nous vous invitons à prendre connaissance de l'article suivant, écrit par Jean-François Dupaquier, écrivain-journaliste et témoin-expert au Tribunal pénal international pour le Rwanda:
Sale temps pour le mercenaire et capitaine de gendarmerie honoraire Paul Barril : l’expertise de l’attentat contre le président du Rwanda Juvénal Habyarimana, qui pointe la responsabilité d’extrémistes hutus, est validée par la chambre de l’instruction de la Cour d’Appel de Paris. Et Agathe Habyarimana se désolidarise du mercenaire à son service...
Il avait pourtant fait des pieds et des mains pour “prouver” que l’attentat du 6 avril 1994 contre l’avion du président Habyarimana était l’oeuvre du Front patriotique rwandais. Au point qu’un livre ne suffirait pas pour raconter toutes les intrigues du mercenaire et capitaine de gendarmerie honoraire Paul Barril afin de conduire le peu perspicace juge Jean-Louis Bruguière sur de fausses pistes. Alors mandaté par Agathe Habyarimana, veuve du chef de l’Etat Rwandais, Barril s’est révélé un spécialiste de haut vol en désinformation et enfumage tous azimuts. Il avait même rallié à sa cause un universitaire français, André Guichaoua, qui a couvert de son autorité le ”témoignage” sur l’attentat écrit par un imposteur, le “lieutenant” Abdul Ruzibiza (« Rwanda, l’histoire secrète », Ed. Panama, 2005). Et convaincu le polémiste Pierre Péan, aujourd’hui hagiographe de Jean-Marie Le Pen, d’écrire lui aussi un livre en ce sens, « Noires fureurs, blancs menteurs » (Ed. Fayard). Succédant au juge Bruguière, les juges Nathalie Poux et Marc Trévidic ont fait voler ce château de cartes.
La cause de Barril semble aujourd’hui si mauvaise que l’avocat d’Agathe Habyarimana, Me Meilhac, a fait savoir au juge Trévidic que sa cliente se désolidarisait de Paul Barril. Une noire fureur née de l’annonce du résultat des perquisitions aux différents domiciles de Paul Barril et de la fragilité de son alibi pour le soir du 6 avril 1994. Le coup de grâce a été donné mardi 19 mars : le travail des experts désignés par les juges Nathalie Poux et Marc Trévidic est confirmé par la chambre de l’instruction de la Cour d’Appel de Paris. Les avocats des officiers du FPR suspectés de l’attentat ont rappelé le film des événements dans un communiqué. Un rappel plus qu’utile.
Les deux juges d’instruction avaient désigné un collège d’experts chargés de vérifier les hypothèses des sites de lancement qui pouvaient servir au départ des missiles ayant abattu le 6 avril 1994 en soirée le Falcon ayant à son bord les présidents rwandais et burundais – et donné le signal du génocide des Tutsis du Rwanda, un million de morts en cent jours.. Le collège d’experts s’était rendu au Rwanda en 2010 et le 10 janvier 2012, avait conclu que le site le plus vraisemblable pour le tir des missiles était situé au camp militaire Kanombe, tenu par les militaires hutus les plus extrémistes, écartant du même coup l’hypothèse d’un tir provenant de Masaka, contrairement à l’ordonnance des mandats d’arrêt internationaux de Jean-Louis Bruguière.
Certaines parties civiles essentiellement liées à Madame Agathe Habyarimana, ont tenté, et pour cause, écarter ce rapport qui était totalement défavorable à leur thèse. Elles ont essayé de provoquer la nullité de la mesure d’expertise voire d’obtenir une nouvelle et seconde expertise ou encore des compléments d’enquêtes. Toutes ces demandes avaient été rejetées par ordonnance des juges Trevidic et Poux prononcée en juin 2012. Les juges avaient cependant prescrit aux experts de fournir des éclaircissements sur un point technique concernant l’impact de la trajectoire des avions sur le tir des missiles, ce que la défense avait accepté. La majorité des parties civiles avait aussi accepté l’ordonnance du juge. Seul le même groupe minoritaire proche d’Agathe Habyarimana avait interjeté appel devant la chambre d’instruction de la Cour d’Appel de Paris.
Les parties ont longuement plaidé le 29 janvier 2013. La défense avait demandé à la Cour de confirmer l’ordonnance des juges d’instruction Nathalie Poux et Marc Trevidic et de rejeter l’appel interjeté. Telle était également la position de l’Avocat général qui avait clairement pris position pour le respect du travail des experts et des juges d’instruction.
Ce 19 mars 2013, la Cour d’Appel de Paris a suivi la position de l’Avocat général et de la défense. Elle a déclaré non fondé l’appel d’Agathe Habyarimana et de ses proches.
Pour Me Lef Forster, avocat au Barreau de Paris et Me Bernard Maingain, avocat au Barreau de Bruxelles, “cet arrêt s’inscrit dans la continuité de l’instruction qui a mis en évidence le caractère fantaisiste des accusations formulées à l’encontre des militaires du Front patriotique rwandais”. Ils pointent du doigt à cette occasion “l’absence de preuve fiable et des manipulations graves de la justice française. Les développements récents montrent en outre que désormais les recherches doivent s’orienter vers les extrémistes hutus voire dans certains cercles en France, proches de ceux-ci.”
Pour les personnes visées visiblement à tort par l’ordonnance du magistrat Jean-Louis Bruguière, cette décision doit faciliter le prononcé d’un non-lieu, espèrent les deux avocats. Cette issue prévisible pourrait être retardée par un pourvoi en cassation contre l’arrêt de la Cour d’Appel de Paris soutenu par l’Avocat général. Un tel pourvoi démontrerait qu’Agathe Habyarimana et sa famille ne chercheraient plus qu’à retarder la réorientation de l’enquête en direction de leurs amis des milieux extrémistes hutus.
Jean-François DUPAQUIER
(extrait de Afrikarabia)
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